lundi 24 décembre 2007

Quelques souvenirs de 2007

C'est une tradition chez la plupart des blogs musicaux : le dernier message de l'année sert à récapituler ce qui s'est fait de mieux au cours des 12 derniers mois. Si cet exercice prend généralement la forme d'un classement de disques, je préfère m'en tenir à une simple liste de morceaux car, je ne le répéterai jamais assez, je suis amateur de chansons, rarement d'albums.
Deuxième chose, je ne prétends surtout pas donner une image définitive de ce qui s'est fait en 2007 : les découvertes musicales se faisant généralement une ou deux années à rebours (à moins de travailler dans l'univers musical, d'être un téléchargeur fou ou de lire plein de magazines spécialisés, il est difficile de se tenir au courant de ce qui sort et existe). Il faut donc considérer la liste qui suit comme un simple échantillon ; juste quelques chansons sur lesquelles j'ai eu la chance de tomber et qui m'ont bien plu.

Avec cette sélection, je souhaiterais néanmoins insister sur une chose : nous vivons une époque formidable. On peut toujours regretter de ne pas être en 1967 ou en 1977 mais, très honnêtement, rarement le rock'n'roll n'a été de si bonne qualité et aussi facilement accessible. En 2007, les Coral ont composé des chansons parmi les plus belles jamais écrites tandis que la fantastique Amy Winehouse pouvaient être entendue partout, même sur les radios les plus affreuses. Ceux qui ont allumé leur télé ont sûrement remarqué l'omniprésence du rock'n'roll dans les pubs télé ; c'est quelque chose qui, je pense, n'a pas de précédent. Et la distribution s'est mise au diapason : alors qu'il fallait fouiller tout Paris il y a quelques années pour dénicher un disque écoutable, tout est devenu plus facile ; que ce soit en ligne ou en boutique, la bonne musique n'a jamais été autant accessible.

N'ayons pas peur de le dire : le rock'n'roll est à la mode et la soul retrouve peu à peu ses lettres de noblesse. Évidemment, tout n'est question que de cycle. Si nous surfons en haut de cette vague grouve, la tendance va s'estomper. Dans 5 ans, tout sera fini. Les media ne jureront que par les nouvelles sonorités branchées : Jazztonik, Elecktrofolk, R'n'Z et plein d'autres noms ridicules. Alors profitons de la chance que nous avons aujourd'hui : faites des réserves de disque avant que la disette ne sévisse, précipitez-vous à tous les concerts avant qu'il ne soit trop tard et continuez à lire Infrasons.

Nicole Atkins - War torn
Le morceau théâtral et emphatique de l'année
(site / Myspace / acheter Neptune city sur Amazon)

Kevin Ayers - Cold shoulder
La perle pop délicate et touchante de l'année
(site / Myspace / acheter The unfairground sur Amazon)

Billy Childish & the Musicians of the British Empire - Joe Strummer' s grave
Le brûlot teigneux de l'année (voir la chronique précédente sur Infrasons)
(site / acheter Punk rock at the british legion hall chez Damaged goods)


Coral - Jacqueline
La plus belle chanson de l'année
(site / Myspace / acheter Roots and echoes à la Fnac)

Dadds - Je vais te manquer
La version française de l'année (voir chronique précédente sur Infrasons)
(Myspace / acheter Franch kiss à la Fnac)

Graham Day - Get off my track
L'intro rentre-dedans de l'année (voir chronique précédente sur Infrasons)
(Myspace / acheter Soundtrack to the daily grind chez Damaged goods)

Girls aloud - Fling
L'hymne dansant de l'année
(site / acheter Tangled up chez Amazon)

Gossip - Listen up!
La chanteuse la plus forte de l'année, dans tous les sens du terme
(Myspace / acheter Standing in the way of control chez Amazon)

Go! Team - Doing it right
Le morceau funk de l'année
(site / Myspace / acheter Proof of youth à la Fnac)

Micky Green - Oh
La chanson la plus appaisante de l'année
(Myspace / acheter White T-shirt à la Fnac)

Justice - D.A.N.C.E
Le rythme disco de l'année
(Myspace / acheter Justice à la Fnac)

La sucrerie girl-groups de l'année
(Myspace / acheter Stalking stills chez Fraction discs)

Little man tate - Sexy in latin
La chanson imparable de l'année
(site / Myspace / acheter About what you know sur Amazon)

Lucy & the Popsonics - Eu quero ser seu Tamagochi
Le meilleur morceau sur les Tamagotchis de l'année
(Myspace / acheter Fabula (ou a farsa) de dois eletropandas chez CDuniverse)

La meilleure chanson vue sur scène de l'année

Michelles - Springtime
Le titre joyeux de l'année
(site / Myspace / acheter Springtime à la Fnac)

La chanson anglaise de l'année

Yael Naim - New soul
La chanson de l'année pour aller courir dans les champs
(Myspace / acheter Yael Naim chez Tôt ou tard)

Candie Payne - I wish i could have loved you more
La chanteuse la plus charmante de l'année (voir chronique précédente sur Infrasons)
(site / Myspace / acheter I wish i could have loved you more à la Fnac)

Amy Winehouse & Mark Ronson - Valerie
La tuerie soul de l'année (voir chronique précédente sur Infrasons)
(site / acheter Version à la Fnac)

Joyeux noël et que Jésus soit avec vous!

lundi 17 décembre 2007

La minute yéyé (4) : Cléo / Violaine


Noël approche. Vous avez rédigé la liste des cadeaux à offrir à la famille et aux amis, puis celle des ingrédients pour les repas des 24 et 25. À cela s'ajoute une mauvaise surprise : en sortant le carton des décorations, vous découvrez que les belles guirlandes achetées l'année dernière ont perdu presque tous leurs poils brillants. Quelle camelote! Vous voilà bons pour en racheter.
Cette semaine, vous avez eu un travail monstre ; donc pas le temps de faire de courses. Alors c'est ce samedi la dernière occasion pour aller dans les grands magasins. Il va falloir se frayer un chemin dans la cohue ; d'abord se faufiler entre les gamins et les Japonais scotchés aux vitrines, puis dans les rayons au milieu des mères de familles nerveuses, stressées et désagréables. Bien sûr, il fera très froid dehors et vous aurez pris votre gros manteau...qui vous fera crever de chaud tout l'après-midi à l'intérieur des Galeries ou du Printemps
Alors vous vous rappellerez cette chanson ("Les fauves") dans laquelle Cléo raconte son calvaire, perdue au milieu des grands magasins et de leurs clients.

Cléo - Les fauves
(disponible sur la compilation Ultra chicks, Vol.1 dont vous trouverez des infos sur Bardotagogo)

Cléo, c'était un peu la version féminine de Jacques Dutronc. Le bonhomme lui avait même écrit cette chanson : "Et moi, et toi, et soie", dont le titre, la mélodie et les arrangements font inévitablement penser au "Et moi, et moi, et moi" : rythme sec, tranché et répétitif posées sur d'entraînantes descentes de basse. Le tout saupoudré de jeux de mots qui vont parfois chercher très loin ("sois pure, Hélène, il fait si froid"). Presque du Boby Lapointe, là!

Cléo - Et moi, et toi, et soie
(acheter Singing Paris à la Fnac)

Et puis comme le moment des cadeaux approche, je vous offre, comme ça, gratuitement, une autre perle yéyé, chantée par Violaine (vous remarquerez comme moi qu'un loi semble interdire aux chanteuses yéyé d'avoir un nom de famille). La donzelle en question n'a certainement pas la voix la plus mélodieuse du monde, mais c'est une véritable furie!
Pour la petite histoire, le morceau a été enregistré complètement à l'arrache. Ford avait signé un contrat avec Violaine pour des campagnes publicitaires, et exigé qu'elle sorte, incessamment, un 33 tours. Les paroles furent donc achevées dans le studio, juste avant l'enregistrement. Pire, les musiciens étaient en grève ce jour-là, d'où des arrangements qui ne correspondent pas à l'idée de départ. Mais ce côté improvisé et cette urgence contribuent à l'attrait du morceau : il y a quelque chose de punk là-dedans et, surtout, de franchement rigolo.
Pour finir, si j'étais historien, sociologue, ou quelque chose comme ça, cette chanson serait un matériau de recherche de premier ordre. Il symbolise assez bien les aspirations et les fantasmes des adolescents français au milieu des années 1960. Si, durant la décennie précédente, la jeunesse rêvait d'Amérique et de Cadillac, c'est désormais vers l'Angleterre, ses Austin Cooper et ses BSA qu'elle est rivée. Les Beatles sont passés par là.

(sur la compilation Ils sont fous ces Gaulois, Vol.3, trouvable d'occasion)

lundi 10 décembre 2007

Les Heptones

Été 1964, une chaleur torride écrase la Jamaïque. Pour les innombrables groupes de ska qui font danser l'île, c'est une catastrophe. À cours de salive, les lèvres des trompettistes restent collées à leur instrument, tandis que les doigts des guitaristes fondent sur l'acier ou le nickel brûlants des cordes. Rassurez-vous, je vous épargne le sort des malheureux batteurs!
Quand sur les pistes de danse des Sound systems le public s'effondre, vaincu par la fournaise, un mot d'ordre résonne de toute part : "il faut ralentir le rythme". Ce tempo moins rapide donne naissance à un nouveau courant musical : le rocksteady.

Les Heptones sont un des premiers groupes qui triomphent grâce ce mélange de ska et de soul américaine, plaçant "Fattie fattie" en tête des ventes en 1966. Ils sortent cette même année le fabuleux "Gunmen coming to town", une chanson reprenant un thème caractéristique de la musique jamaïcaine, celui des "rude boys" (dits aussi "rudies"), c'est-à-dire les voyous, ceux qui sèment la terreur dans les bidonvilles.
Seulement indépendant depuis 1962, le pays a bien mal négocié ses premières années d'autonomie. Le chômage y est alarmant, les conditions de vie déplorables et insalubres et, pour les innombrables adolescents des bidonvilles, la débrouille et la violence deviennent des issues naturelles. Le rocksteady est étroitement lié à cette pègre qui fournit aussi bien musiciens qu'hommes de main pour déstabiliser la concurrence. Des chansons bourgeonnent de partout pour vanter les exploits des "rudies", des gangs et de leurs flingues.
Au contraire, certains groupes, comme les Heptones, tentent de mettre un holà à cette escalade, dénonçant dans "Gunmen coming to town" les méfaits de voyous munis de pistolets et de crans d'arrêt. Heureusement, la cavalerie (ou plutôt la police jouant l'ouverture de "Guillaume Tell" à la trompette) finit par arriver et par mettre tout ce petit monde sous les verrous. Ouf!

Heptones - Gunmen coming to town
(acheter le coffret Trojan-Rude boy chez Amazon)

dimanche 2 décembre 2007

Biff! Bang! Pow!

Pif! Paf! Pouf! Aujourd'hui nous nous intéressons à Biff! Bang! Pow!, un petit label anglais qui vient de se faire racheter par Detour records. Vu le nom, on imagine que ses fondateurs ont trop écouté les Creation (qu'on n'écoute d'ailleurs jamais assez), raison pour laquelle ils se sont fixés pour mission de "soutenir les groupes mods d'aujourd'hui". Effort louable. Ces gens sont surtout dotés d'un flair infaillible, parvenant à remplir leur catalogue de véritables merveilles. Deux d'entre elles sont même, à mes yeux, des petits joyaux Pop, axées sur une structure mélodique complexe mais lumineuse : refrains / contre-refrain / ponts / montées en gammes / choeurs / variations de tempo (si j'y connaissais quelque chose en musique, je pourrais utiliser pleins de mots savants : accelerando, tempo primo, più moto,...mais je ne me risquerai pas sur ce terrain).


En premier lieu, les Green circles prouvent que, malgré leurs airs de surfeurs, les Australiens ont toujours du sang anglais dans les veines. La chanson "Brown house in Stepney where whe live" pourrait figurer parmi les meilleures chansons des Kinks (donc de facto parmi les plus beaux morceaux jamais écrits sur les huit planètes du système solaire, plus leurs satellites et leur proche banlieue). Il y a vraiment une touche Ray Davies-sienne dans la composition : cette aptitude à décrire un lieu (la cour d'une maison dans la banlieue d'Adélaïde), un instant, une météo, un peu à la "Waterloo sunset".

Green circles - Brown house in Stepney where we live
(site / Myspace / acheter Green circles ou la compilation Shimmy! chez Detour records)


Les Lost 45s sont eux originaires de Leeds. Pas la peine d'aller chercher trop loin pour trouver leurs influences : les Jam ou les Prisoners bien-sûr avec cette voix Northern soul, ces délicates touches de clavier et puis, petit plus, des choeurs absolument oniriques (servis par l'organiste du groupe) qui élèvent le morceau "The man that time forgot" toujours plus haut. Une chanson Mod, tout simplement.






Lost 45 - The man that time forgot
(site / Myspace / acheter What time do you call this? chez Detour records)