lundi 5 octobre 2015

Les Dixie Cups


(copie d'un article rédigé pour les amis de PlanetGong


Parmi la myriade des girl-groups des années 60 (Supremes, Ronettes, Shangri-las, Martha et les Vandellas, pour ne citer que les meilleurs), les Dixie Cups suscitent une sympathie particulière, du moins chez l’auteur de ces lignes. Certes, leur carrière est brève et leur discographie peut sembler ténue ; elle recèle cependant nombre de chefs-d’œuvre du genre. Et puis, on trouve un ovni dans leur répertoire, une incongruité qui nous plonge dans les traditions étonnantes du Carnaval et du Mardi gras créole. Nous y reviendrons un peu plus loin.

Originaires de la Nouvelle-Orléans (détail qui aura son importance pour la suite de l’histoire), les Dixie Cups sont, comme souvent chez les girl-groups, une histoire de famille ; la formation réunit ainsi les deux sœurs Hawkins et leur cousine. La scène rhythm’n’blues est alors foisonnante à la Nouvelle-Orléans (Fats Domino, Lee Dorsey, Allen Toussaint, Earl King, Irma Thomas,…). C’est d’ailleurs une célébrité locale, le chanteur / producteur Joe Jones, qui les repère lors d’un concours musical et leur décroche un contrat à New-York avec Red Bird Records.

Dès lors, le groupe bénéficie de la fameuse équipe de compositeurs / producteurs juifs new-yorkais (« di vunderlekhe manshaft », dirait-on en yiddish) qui enchaîne les tubes avec une facilité déconcertante : Jeff Barry, Ellie Greenwich, Jerry Leiber, Mike Stoller, et même une petite contribution de Phil Spector. C’est d’ailleurs Stoller qui baptise le groupe Dixie Cups (nom des petits gobelets en carton, souvent utilisés pour servir les glaces). Le succès est immédiat puisque le premier 45 tours (« Chapel of Love ») atteint la première place du Billboard Hot 100 en juin 1964, détrônant les Beatles.

Ce qui interpelle avant tout chez les Dixie Cups, c’est la qualité du chant, élégant, sans artifice, alliant avec bonheur les voix des trois interprètes ; il met en valeur des mélodies lumineuses et souveraines (« I’m Gonna Get You Yet », « People Say », « Girls Can Tell »,…). Au contraire, l’instrumentation sait rester sobre, laissant le premier rôle aux parties vocales, preuve de l’intelligence des producteurs.

Le répertoire du groupe recèle par ailleurs une curiosité, « Iko Iko », dont l’histoire mérite d’être contée. Au cours d’une session de studio, en 1964, nos trois cousines profitent d’une pause pour interpréter une chanson qu’elles tiennent de leur grand-tante, sans se douter que la bande d’enregistrement continue à tourner. Marquant le rythme avec des percussions improvisées (un cendrier, une bouteille de Coca et une chaise en aluminium), elles reprennent sans le savoir « Jock-A-Mo », chanson écrite 11 ans plus tôt par James Crawford et inspirée par les scènes de carnaval de la Nouvelle-Orléans.

Pour fêter Mardi gras, de nombreux Afro-américains paradent en effet dans la capitale de la Louisiane déguisés en « Indiens », c’est-à-dire parés de grandes plumes multicolores et dansant sur des rythmes tribaux. Témoin de ces scènes qui symbolisent depuis le XIXe siècle le caractère culturel unique de la Nouvelle-Orléans (influencé notamment par les traditions françaises, amérindiennes et africaines), James Crawford a inséré dans sa chanson des formules prononcées par les « Indiens » à cette occasion, bien qu’il n’en comprenait pas le sens.

Les linguistes s’écharpent depuis de longues années sur la signification de ces phrases mystérieuses (« Iko, Iko, un-day, Jock-a-mo fee-no ai na-na, Jock-a-mo fee na-na »). S’agit-il d’une langue amérindienne ? Ou de formules ouest-africaines ayant transité par Haïti ? La thèse la plus fréquemment admise privilégie l’origine créole française. « Iko » serait ainsi une retranscription phonétique de « Akout » qui dériverait du français « Écoute ». Bonne nouvelle, la chanson peut donc entrer dans les quotas francophones. À noter d’ailleurs que Julie Dassin (la sœur de Joe) a repris le morceau en français en 1967, dans une version d’assez bon aloi.

Mais revenons à nos Dixie Cups. Lorsque les producteurs écoutent les bandes d’enregistrement du studio, ils se rendent compte que la version impromptue de « Jock-A-Mo » est un tube en puissance. On rajoute quelques ornements ci et là, et le tour est joué ; le disque se vend comme des petits pains sous le nom de « Iko Iko » (il donnera bien entendu lieu à toute une série de procès d’ayant-droits ; mais ne nous attardons pas sur ces détails).

En 1965, les Dixie Cups changent de label, signant chez ABC, le temps d’enregistrer un album et une poignée de 45 tours. Les compositions ne sont toutefois pas du même niveau et les disques ne rencontrent pas le succès escompté. Le groupe se sépare donc en 1966, se reformant depuis ponctuellement pour des concerts.

♫  Dixie Cups - I'm Gonna Get You Yet


♫  Dixie Cups - People Say


♫  Dixie Cups - Girls Can Tell


♫  Dixie Cups - Iko Iko


♫  Dixie Cups - Chapel of Love


samedi 17 janvier 2015

Quelques souvenirs de 2014



Noël ! Joie ! Voici la sélection annuelle d'Infrasons ; une tradition qui affiche un âge désormais respectable (vous pouvez consulter les sélections 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013). L'exercice est le même que d'habitude : je vous livre ici mes chansons préférées de 2014 (par ordre alphabétique), avec un seul morceau par artiste.

Mode d'emploi : deux possibilités s'offrent à vous pour écouter les morceaux :
1) Écouter un morceau individuellement : cliquer sur le lecteur situé sous chaque chanson
2) Lancer la liste des morceaux à la suite : cliquer sur la barre rose située tout en bas de la page


Allah-Las - Follow You Down
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Worship the Sun
(site)


 
Bleached - For the Feel
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait du 45t For the Feel

 

Charles Bradley et LaRose Jackson - Luv Jones
Origine : New-York (États-Unis d'Amérique)
Extrait du 45t Luv Jones

 

Gareth Davies - Thistledown Lodging
Origine : Pays de Galles
Extrait de The Spirit Garden


Goat - Talk to God
Origine : Korpilombolo (Royaume de Suède)
Extrait de Commune


 
Klaus Johann Grobe - Les Grecks
Origine : Zürich (Confédération helvétique)
Extrait de Im Sinne der Zeit
(site)


 
Kikagaku Moyo - Kodoma
幾何学模様 - 木霊
Origine : Tokyo (Empire du soleil levant)
Extrait de Forest of Lost Children


King Tuff - Eyes of the Muse
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Black Moon Spell
(site)



Meatbodies - Disorder
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Meatbodies



Matthew Melton - Words I Never Learned
Origine : Oakland (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Outside of Paradise

 

Miriam - My Love Has Gone
Origine : Sudbury (Canada) et New-York (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Nobody's Baby

 
Natural Child - I'm Gonna Try
Origine : Nashville (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Dancin' With Wolves

Jim Noir - The Ancoats Dream
Origine : Manchester (Perfide Albion)
Extrait de Finnish Line


 

Nude Party - Sweet Shops
Origine : Caroline du Nord (Vieux Sud)
Extrait de Forbidden Fruits

 

Paperhead - Eye for Eye
Origine : Nashville (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Africa Avenue



Richard in Youre Mind - Look You Gave
Origine : Sydney (Australie)
Extrait de Ponderosa


Naomi Shelton et les Gospel Queens - Bound for the Promised Land
Origine : Midway (Vieux Sud)
Extrait de Cold World


Tomorrow Tulips - Surplus Store
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait de When
(site)


Triptides - Clementine
Origine : Bloomington (États-Unis d'Amérique)
Extrait du 45t Clémentine


 
Vaudou Game - Pas contente
Origine : Lyon (République française) et République Togolaise
Extrait de Apiafo

 
Nick Waterhouse - Let It Come Down
Origine : San Francisco (États-Unis d'Amérique)
Extrait de Holly
(site)

 

White Fence - Like That
Origine : Los Angeles (États-Unis d'Amérique)
Extrait de For the Recently Found Innocent